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Fake news IA : pourquoi Meta a laissé la vidéo

Une vidéo générée par IA se révèle être un Fake news annonçant un coup d’État en France a semé le trouble. Plus de 13 millions de vues avant d’être retirée. Emmanuel Macron lui-même a exprimé son indignation face à l’inaction de Meta. Cette affaire révèle les failles béantes de la modération des contenus sur les réseaux sociaux.

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Une désinformation virale aux conséquences internationales

La vidéo en question montrait une fausse journaliste annonçant la “chute de Macron” suite à un prétendu coup d’État militaire. Un hélicoptère survolait la Tour Eiffel en arrière-plan. Le tout créé de toutes pièces par intelligence artificielle. Le contenu a accumulé plus de 200 000 likes, 9 000 commentaires et 17 000 partages. Des chefs d’État africains ont même contacté le président français pour s’enquérir de la situation.

L’auteur, Rachid B., basé au Burkina Faso, vend des formations pour créer ce type de fausses vidéos. Sa page Facebook regorge de contenus similaires. Attaques de lions contre des motards, baleines volant au-dessus d’Abidjan, pluies de requins. L’IA permet désormais de fabriquer des fake news avec des scènes impossibles avec un réalisme troublant.

Le refus de Meta qui interroge

Les équipes présidentielles ont signalé la vidéo via la plateforme Pharos. Ce dispositif du ministère de l’Intérieur permet de signaler les contenus illicites aux autorités. Pharos contacte ensuite les plateformes pour demander le retrait. La réponse de Meta a surpris : refus catégorique de supprimer le contenu. Le motif invoqué ? La vidéo “ne contrevient pas à nos règles d’utilisation”.

Meta s’est contenté d’apposer une étiquette indiquant que le contenu “peut avoir été créé ou retouché numériquement”. Une mention discrète face à une désinformation massive. Le groupe américain n’a pas expliqué les raisons précises de son refus. L’auteur a finalement supprimé la vidéo de lui-même pour éviter des problèmes juridiques. Mais des copies circulent encore sur Instagram.

Cette posture de Meta soulève des questions sur sa responsabilité. La plateforme avait pourtant promis en 2020 de supprimer les deepfakes. Le géant technologique développe ses propres outils d’IA tout en peinant à contrôler les contenus générés par ces technologies. Les défis posés par l’IA et Meta illustrent parfaitement cette contradiction apparente entre innovation technologique et régulation des contenus.

Les obligations européennes ignorées

Le Digital Service Act (DSA) est censé réguler les plateformes numériques en Europe. Meta a signé en février dernier un code de bonnes pratiques contre la désinformation. Le règlement exige le retrait rapide des contenus illicites après signalement. Le maintien de la vidéo semblait donc contrevenir au DSA. Pourtant, aucune action immédiate n’a été prise.

Bruxelles a ouvert cinq enquêtes formelles depuis l’entrée en vigueur du DSA. Meta, TikTok, AliExpress et X sont dans le viseur. Ces plateformes sont régulièrement accusées de ne pas respecter leurs obligations de modération. Une enquête vise spécifiquement X pour déterminer si le réseau d’Elon Musk remplit ses devoirs concernant la désinformation.

Les algorithmes des réseaux sociaux privilégient les contenus générant des clics. La véracité passe au second plan. Cette logique crée une véritable économie de la désinformation. Pour Elon Musk, la modération équivaut à de la censure. Sa vision de la liberté d’expression absolue complique la lutte contre les faux contenus.

La réduction des équipes de modération

Meta a progressivement réduit ses équipes de modération humaine. Les intelligences artificielles les remplacent. Il y a un an, le groupe a supprimé son programme de financement de médias fact-checkeurs aux États-Unis. Ces vérificateurs débusquaient les fausses informations sur Facebook et Instagram. Le nouveau système, les “Community Notes”, délègue cette tâche aux utilisateurs eux-mêmes.

Ce modèle popularisé par X soulève des interrogations. Peut-on confier la vérité aux internautes sans formation spécifique ? Les notes communautaires arrivent souvent trop tard. La vidéo sur le coup d’État a eu le temps d’atteindre des millions de personnes avant toute réaction. Le mal était déjà fait.

La réduction des modérateurs humains s’explique par des considérations économiques. Former et employer des milliers de personnes coûte cher. L’IA représente une solution moins onéreuse. Mais elle montre ses limites face aux deepfakes de plus en plus sophistiqués. Les machines peinent à distinguer le vrai du faux quand l’IA génère du contenu photo-réaliste.

L’impuissance présidentielle face aux géants du numérique

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Emmanuel Macron a ironisé sur sa propre impuissance face aux plateformes. “J’ai tendance à penser que j’ai plus de moyens de pression que qui que ce soit”, a-t-il déclaré à Marseille. “Ça ne marche pas.” Cette confession illustre le rapport de force déséquilibré entre États et multinationales technologiques.

Le président français a dénoncé le mépris des plateformes. “Ces gens-là se moquent de nous”, a-t-il affirmé. “Ils se foutent de la sérénité des débats publics.” Les fake news prolifèrent sans contrôle efficace. Elles mettent en danger la souveraineté des démocraties selon lui.

Macron appelle à une politique contraignante à l’échelle française et européenne. Les contenus manifestement faux qui menacent la sécurité publique doivent pouvoir être retirés rapidement. Il défendait récemment une “labellisation” des médias pour lutter contre la désinformation. Une proposition qui suscite le débat sur la liberté de la presse.

Les défis de l’ère de l’IA générative

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L’affaire révèle les défis posés par l’IA générative. N’importe qui peut désormais créer des vidéos hyperréalistes en quelques minutes. Les outils se démocratisent rapidement. Les formations pour générer des deepfakes se vendent sur les réseaux sociaux. Le créateur de la vidéo sur le coup d’État se vante d’avoir gagné 330 000 abonnés grâce à l’IA.

Cette facilité de création dépasse largement les capacités de détection et de modération. Les plateformes courent après la technologie sans jamais la rattraper. Chaque progrès dans la génération de contenus IA exige des réponses en termes de détection et régulation. La course semble perdue d’avance.

L’avenir s’annonce complexe. Les élections, les crises internationales, les débats de société seront de plus en plus pollués par des contenus artificiels. La confiance dans l’information en ligne s’érode. Distinguer le vrai du faux devient un exercice quotidien épuisant pour les citoyens. Les institutions peinent à s’adapter à cette nouvelle réalité numérique.

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